LÉGERS GRINCEMENTS
Inutile d’ouvrir les rideaux de fer :
personne n’a la force de contrecarrer la loi de l’existence.
Avec peine l’un de nous soulèvera un léger grincement
à la toile d’araignée qui nous attache pour toujours.
Les limites furent ordonnées par un être froid
et implacable qui gît dans notre corps
et dans les après-midi de sieste nous ne le percevons pas :
il est là palpitant sous la peau qu’un jour on nous a peinte.
Le temps fut une invention de crabes étrange épiphanie de loirs ailés :
dans les siècles apparaît un éternel présent d’animaux antédiluviens
comme si une épaisse couche de fougères entravait pour toujours le mécanisme.
Fuis à la fin des heures et pénètre dans la mémoire
de ceux qui une fois t’ont possédé.
Tout fut seulement l’animal qui nous unit la morsure l’égratignure
de la mort infectieuse :
Dans tes larmes dans mon désir obscur dans les draps blessés
se voyaient les ongles d’un Zeppelin récemment abattu
ou la toile d’araignée d’une horloge avec des yeux et des veines.
Fuis sans regarder derrière et n’invoque pas l’usure
ne pleure pas dans des villes étrangères dans des escaliers délabrés :
sur une étrange planète s’entassent les voix des amants
les radios pas cher qui crachaient des mélodies démodées…
Un à un les matelas furent vendus à des entrepôts
et notre inquiétude d’amants secrets fut échangée pour des clous.
Toutes les avenues pleines d’huile et de plomb ont vu ces jours-ci
passer la marche funèbre des foudroyés à contretemps.
Les tombes dans tous les cimetières ne satisfont pas les pressés
qui nous ont vu courir main dans la main dans une sale ruelle.
Ici les papillons ont changé leur direction vers des précipices
et la poussière se lève des collines où nous jouons
entre azalées et chrysanthèmes de feu.
Dans les stations d’autobus dans les aéroports où tu arrives
caresse les murs que des égyptiens viennent de polir
écoute les coups de tampons sur les visas inutiles.
Dans ces rues quelque chose comme une odeur de toi toujours inquiète
les employés des boulangeries.